De nombreuses entreprises chinoises sous-traitent leur production de textile en Corée du Nord, à l’insu de leurs donneurs d’ordres occidentaux, rapporte Reuters. Comme toutes les usines nord-coréennes appartiennent au gouvernement communiste de Pyongyang, cela implique que les consommateurs occidentaux qui achètent les vêtements ainsi produits soutiennent le régime du dictateur Kim Jong-un.
“Made in China”. Nous avons tous déjà rencontré cette annotation sur un t-shirt, un jeans, une paire de chaussures… Il est vrai qu’une grande partie de nos vêtements et chaussures sont produits en Chine. Mais une enquête menée par Reuters montre que les fabricants de textile chinois sous-traitent de plus en plus leur production à des usines basées en Corée du Nord. La raison ? La main d’oeuvre y est bien moins chère, expliquent ainsi des courtiers de Dandong (une ville chinoise située au sud de la frontière avec la Corée du Nord) à l’agence de presse. Les coûts de fabrication des vêtements produits en Corée du Nord seraient “75 % moins élevés”.
Les autorités chinoises ont annoncé le mois dernier que leurs échanges commerciaux avec la Corée du Nord avaient augmenté de 10,5 %. Au premier semestre 2017, les exportations chinoises (majoritairement de textile) vers la Corée du Nord ont augmenté de près de 30 %, pour s’établir à 1,67 milliard de dollars (1,43 milliard d’euros), a rappelé Huang Songping, la porte-parole des douanes chinoises, à Reuters. Ces exportations consistent en du tissu et des matériaux nécessaires à la confection des vêtements dont les usines nord-coréennes assurent la fabrication.
Des ouvriers qui ont une autre motivation que l’argent
“Les Nord-Coréens ne sont pas comme les ouvriers d’usines chinoises qui travaillent uniquement pour l’argent. Ils travaillent pour leur pays et leur dirigeant”, commente ainsi un courtier à Reuters.
Et cette motivation les conduiraient à produire “30 % de vêtements de plus que les travailleurs chinois” chaque jour, toujours selon le même courtier. Par exemple, ils n’osent pas aller aux toilettes, de peur de freiner la chaîne de production. Ils sont également nettement moins bien payés que dans d’autres pays asiatiques, puisqu’ils perçoivent 160 dollars en moyenne par mois (environ 137 euros), alors que les salaires moyens en Chine sont de 450 à 750 dollars par mois (384 à 641 euros). Et ils ne peuvent conserver qu’un tiers du montant perçu, le reste devant être reversé à l’Etat nord-coréen.
La transparence pas toujours de mise
“Nos commandes viennent de partout dans le monde”, déclare un autre homme d’affaires de Dandong. C’est par cette ville chinoise frontalière que transite la majorité du commerce de la Corée du Nord. Des dizaines de courtiers du textile y opèrent pour servir d’intermédiaires entre les fournisseurs et les acheteurs qui viennent des États-Unis, d’Europe, du Japon, de la Corée du Sud, du Canada ou encore de Russie.
Le businessman continue : “Nous demandons aux fournisseurs chinois qui travaillent avec nous s’ils ont l’intention d’être transparents avec le client avec qui ils auront affaire (…) parfois, l’acheteur final ne réalise pas que les vêtements commandés sont fabriqués en Corée du Nord. C’est extrêmement sensible”.
On recenserait une quinzaine de grandes entreprises nord-coréennes exportatrices de vêtements, chacune exploitant plusieurs usines réparties dans le pays, et des dizaines d’entreprises de taille moyenne, selon GPI Consultancy of the Netherlands, qui aide les entreprises étrangères à faire des affaires en Corée du Nord.
Ainsi, la marque Rip Curl s’est excusée publiquement l’année dernière quand une enquête a révélé que certains de ses vêtements de ski “made in China” étaient en fait fabriqués en Corée du Nord.
Les sanctions internationales
L’Organisation des Nations unies (ONU) a récemment durci les sanctions contre la Corée du Nord, mais ces dernières ne concernent pas le textile, qui représentait en 2016 le second plus grand poste d’exportations de la Corée du Nord, après le charbon et d’autres minéraux, selon les données de la Korea Trade-Investment Promotion Agency (KOTRA).
La Corée du Nord n’a désormais plus le droit d’exporter son charbon, mais le pays de Kim Jong-un semble avoir trouvé une source alternative de financement.
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