Depuis plusieurs mois, on assiste à une escalade de déclarations agressives et de démonstrations militaires entre les Etats-Unis et la Corée du Nord. Ce weekend, le président américain Donald Trump a promis “le feu et la furie”, et “une démonstration de force, comme le monde n’en a jamais vu”. Doit-on en conclure qu’une guerre est imminente, ou ne s’agit-il que d’une rhétorique codée dissimulant d’autres objectifs ?
Avant-hier, Trump promettait “le feu et la colère” si la Corée du Nord n’arrêtait pas ses menaces, hier la patrie de Kim Jong-un a répondu en menaçant d’envoyer quatre missiles sur l’Ile de Guam, territoire américain. Mais plus que des mots, les deux dirigeants vont-ils passer à l’acte ?
Trump promet à la Corée du Nord “le feu et la colère”, une réaction d’une ampleur « que le monde n’a jamais vue jusqu’ici ». pic.twitter.com/mFdgA7EjO3
— thomas snegaroff (@thomassnegaroff) 9 août 2017
Au mois d’avril, Antoine Bondaz, enseignant à Sciences Po Paris et expert sur la question, avait clairement répondu à cette question : “un conflit armé est hautement improbable”. Et il semble que la situation n’ait pas beaucoup changé, malgré les menaces improvisées de Donald Trump.
Les Nord-Coréens veulent un traité de paix et l’établissement de relations diplomatiques
Une attaque américaine sur le sol coréen a très peu de chance de se produire car “si l’objectif de ces frappes est de neutraliser les capacités nucléaires et balistiques de la Corée du Nord, les chances de réussite sont très faibles, et en plus, on ne connait pas forcément toutes les installations du régime”, expliquait Antoine Bondaz.
Inversement, “La Corée du Nord n’a aucune envie d’attaquer les États-Unis” indique ce jeudi dans La Libre Juliette Morillot qui a coécrit “La Corée du Nord en 100 questions”. La Corée du Nord n’est “pas suicidaire”, mais elle veut être prise au sérieux et ne plus de se sentir menacée.
En effet, si l’on se place du point de vue coréen, les menaces adressées par la plus grande puissance mondiale peuvent aussi effrayer. La Corée du Nord “demande la même chose depuis des années”, à savoir sa sécurité (d’où l’arme nucléaire), son autonomie économique (mise à mal par les sanctions) et “la possibilité de parler d’égal à égal avec les autres grandes puissances”, ajoute Juliette Morillot.
Antoine Bondaz abondait dans son sens: “Les Nord-Coréens veulent un traité de paix et l’établissement de relations diplomatiques”.
Mais face aux menaces des États-Unis, la Corée du Nord opte pour les essais nucléaires ou les tirs balistiques. D’abord dans un but de communication mais aussi “pour des raisons techniques. On fait un essai nucléaire ou balistique pour améliorer ses technologies et pour développer un programme”, précisait encore Antoine Bondaz.
En fait, le plus grand danger se situe dans un potentiel conflit entre les deux Corées : “La dernière fois que le Pentagone a communiqué sur la possibilité de lancer des frappes, il a évalué les conséquences d’un conflit ouvert à un million de morts, rien que pour la péninsule coréenne.” C’était en 1994, lors de ce qu’on a appelé “la première crise nucléaire”. Aujourd’hui, Séoul, la capitale de la Corée du Sud, compte plus de 25 millions d’habitants et se situe (toujours) à moins de 100 km des frontières du pays voisin.
Juliette Morillot estime pour sa part que “Trump joue avec le feu”, elle partage l’avis d’Antoine Bondaz: “Si les Nord-Coréens pilonnent Séoul, ils feront des centaines de milliers de victimes en quelques jours sans même avoir à recourir à l’arme nucléaire.”
Enfin, le dernier danger réside plutôt dans la personnalité des deux personnages. Trump est imprévisible, beaucoup se posent d’ailleurs la question de savoir s’il a une véritable stratégie à l’égard de la Corée du Nord. “Il y a un an, il était prêt à manger un burger à Washington avec Kim Jong-un. Mais dans les faits, il veut se différencier au maximum de Barack Obama”. C’est pourquoi il mène une politique extérieure plus interventionniste.
De l’autre côté, on a souvent présenté Kim Jong-un comme un fou. “Faux”, selon Juliette Morillot qui ne dit pas pour autant qu’il n’est pas “dangereux”. Les Nord-Coréens sont en fait très rationnels et appliquent ce qu’ils ont affirmé depuis le premier essai nucléaire : ils assurent leur sécurité. Leur devise est simple: si tu veux la paix, prépare la guerre. Et ça fonctionne, puisque personne ne les a agressés.
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