Mercredi, la Cour européenne de Justice a rendu un arrêt qui donne toute latitude aux États membres pour réglementer les activités des entreprises comme Uber, qui évoluent dans “l’économie du partage” ou “des petits boulots”. Dans le journal français Les Echos, le rédacteur en chef Daniel Fortin appelle l’Europe à favoriser l’émergence de concurrents européens valides pour contrer la toute-puissance des GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) et des autres multinationales du numérique américaines. Car nous ne pourrons compter uniquement sur la loi pour les ralentir, affirme le Français.
Il légitime le choix de l’UE de réglementer ces sociétés pour freiner leurs ambitions. En effet, les GAFA et les autres multinationales du numérique ont largement recours à l’optimisation fiscale, leur contribution aux recettes fiscales des pays où elles opèrent est ridiculement faible en comparaison des bénéfices qu’elles y réalisent :
«Si la pertinence de cette réaction régulatrice est certes parfaitement justifiée sur le plan du droit – il n’est notamment plus tolérable que ces entreprises ne payent pas ou peu leurs impôts dans les pays où elles opèrent -, elle traduit aussi un dérangeant parfum d’impuissance, voire de protectionnisme, face à la « colonisation numérique » américaine. », écrit-il.
Mais il souligne que cette posture ne peut être acceptable que si l’UE parvient à créer en son sein un environnement propice à l’émergence de champions numériques européens :
« Car ne nous leurrons pas : tous les obstacles juridiques du monde ne suffiront pas à éteindre cette nouvelle soif de consommation qu’a suscitée la révolution numérique venue d’Amérique. Et les citoyens ne pardonneraient pas à leurs dirigeants de les priver d’innovations qu’ils ont déjà largement plébiscitées ».
Un “Google européen”, avec 25 millions d’euros de capital …
Fortin n’est pas le premier à poser la question de l’impuissance européenne dans le domaine numérique. A la fin de l’année 2015, la revue Harvard Business Review avait publié une étude intitulée « L’autre crise européenne : une récession numérique ».
Elle concluait que l’Europe était « au milieu d’une récession numérique ». Le magazine expliquait ainsi cette analyse : sur les 50 pays étudiés, dont 23 européens, seuls 3 pays pouvaient s’imposer dans la catégorie de ceux qui étaient capables d’attirer des entreprises internationales en raison de leur fort développement digital. Ces 3 pays étaient la Suisse, l’Irlande, et l’Estonie. Quinze autres pays de l’UE qui avaient connu un niveau élevé de développement numérique avaient perdu du terrain depuis 2008 (incluant le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Belgique et la France). Et le reste se distinguait par son évolution numérique médiocre.
Le problème ? Le financement de nos startups et licornes (les startups d’une valorisation boursière dépassant le milliard de dollars). Ainsi, le moteur de recherche franco-allemand Qwant a reçu en 2015 plus de 25 millions d’euros de la Banque européenne d’investissement (BEI). L’objectif était de lui permettre de rivaliser avec Google.
En octobre, Alphabet, la société mère de Google, a annoncé ses résultats trimestriels. Elle a réalisé un chiffre d’affaires de 27,7 milliards $ et un bénéfice net de 6,7 milliards de dollars au troisième trimestre 2017. Que peuvent bien faire 25 millions d’euros contre cela ?
Résultat : Au début de cette année, Qwant comptait 32 millions de visiteurs par mois, contre 40 000 pour Google … par seconde.
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