La commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, a accusé en novembre le groupe de brasserie AB InBev d’abuser de sa position dominante sur le marché belge. Il ne s’agit pas d’un cas isolé. Vestager mène en effet une campagne plus vaste sur plusieurs secteurs pour éliminer les pratiques visant à fragmenter le marché unique européen.
Selon Vestager, AB InBev tente d’empêcher les supermarchés belges d’importer les bières Jupiler et Leffe de France et des Pays-Bas, où elles sont moins chères. Ainsi, la firme aurait éliminé les traductions en flamand et en français sur les canettes vendues respectivement en France et aux Pays-Bas. En outre, elle interdit aux détaillants hollandais de faire profiter des promotions qu’ils offrent sur les bières dans leurs supermarchés de Belgique.
Les règles de la concurrence bafouées dans plusieurs secteurs
Pour la commissaire, non seulement « les consommateurs belges doivent payer plus pour leurs bières favorites », mais de plus, les pratiques d’AB InBev violent les règles de la concurrence au sein de l’Union Européenne, parce qu’elles ne permettent pas aux consommateurs de profiter des avantages du marché unique en termes de choix et de meilleurs prix.
AB InBev n’est pas la seule cible de Vestager, qui s’est aussi attaquée au géant russe Gazprom. Elle l’accuse de faire signer des contrats qui empêchent ses contractants de vendre son gaz dans un autre pays. Elle enquête également sur les fabricants de jeux vidéo qu’elle soupçonne de tenter d’empêcher les joueurs d’acheter des jeux moins chers dans d’autres pays. De même, elle examine les tour-opérateurs tentés de fixer des prix différents pour la même chambre d’hôtel dans les différents pays du bloc.
La limitation territoriale de l’offre
En fait, il s’agit souvent de pratiques habituelles chez les grossistes et fournisseurs qui utilisent un ensemble de techniques pour empêcher les supermarchés de certains pays de profiter des aubaines qu’ils peuvent trouver dans d’autres Etats membres, ce que l’on appelle la « limitation territoriale de l’offre ». Par exemple, ils peuvent modifier les emballages et les recettes pour fournir un produit réputé différent.
Les grands groupes agroalimentaires affirment qu’ils utilisent ces pratiques pour se conformer aux demandes et aux goûts des consommateurs locaux. Ils invoquent également les réglementations nationales différentes d’un pays à l’autre, et les différences en termes de salaire et de taxation entre les différents Etats membres de l’UE. « Tenir compte des préférences n’équivaut pas à des barrières » , a ainsi résumé une source du secteur.
Mais un avocat spécialiste de la concurrence à Bruxelles affirme que des clients de différents secteurs lui demandent régulièrement comment fragmenter les marchés en toute légalité, dans l’espoir de pouvoir contrôler leur prix de vente.
La Belgique particulièrement vulnérable à ces procédés
Et selon Politico, les Belges sont particulièrement victimes de ces procédés. Une enquête menée sur les prix des supermarchés en 2012 avait conclu que les prix en Belgique étaient en moyenne 10 % plus élevés qu’en Allemagne et aux Pays-Bas, et 7,5 % qu’en France. La propension des Belges à accepter de payer plus cher pour une qualité équivalente jouait un rôle, indiquait-elle.
La Belgique pâtit aussi de sa petite taille. Les chaînes de supermarchés des grands pays comme l’Allemagne peuvent bénéficier de meilleures conditions lors de leurs achats.
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